Atelier «  ces maires et adjoints à la culture qui changent tout »
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Convention Nationale culture(s) – 27 octobre 2019 – Paris

 

ou

 « qu’est ce que les maires et adjoints à la culture écologistes font de différent ? »

12 présent-e-s

Modération : Stéphane Bigata

Prévue, mais excusée-s, : Christine Stievenard maire adjointe de Loos en Gohelle (possibilité de la contacter pour un échange)

 

Intervention de Benoit Careil, adjoint à la Culture de la ville de Rennes,  215 000 habitants

 

Je viens des musiques actuelles et j’ai toujours défendu la reconnaissance de ce secteur, notamment dans le cadre du collectif « Jardins Modernes » http://www.jardinmoderne.org/projet/ . Cela forge une position d’être en résistance pour un lieu ou un collectif. C’est ce qui m’a, en fait, préparé à mon rôle d’adjoint à la Ville de Rennes, et cette expérience, ça m’a porté. C’est ce qui a fait que j’ai eu envie de me retrouver de l’autre côté du bureau.

 L’idée des Etats Généraux de la Culture ça venait du fait qu’on savait qu’il fallait faire bouger les cadres de référence : Pour véritablement changer la ville (nom de notre liste en 2014) il fallait absolument que j’emmène d’autres personnes et que j’élargisse le cercle, qui au départ était plutôt hostile à notre projet.

Dans l’accord de fusion avec le PS, il y avait  les états généraux de la culture. On a rien exigé d’autres sur la culture, on savait que ça suffirait pour changer et pour promouvoir la diversité culturelle et faciliter les initiatives culturelles dans les quartiers. C’était acceptable pour les socialistes

6 mois de préparation. Finalité : bâtir une nouvelle feuille de route. Aller chercher largement, pros de différents secteurs + habitant.es.

Les états généraux de la culture entrait dans le côté participatif, fabrique citoyenne, qui était le projet de gouvernance de la ville. On a beaucoup échangé dans les états généraux, ça se prépare longuement, il a fallu au moins six mois de préparation pour se mettre d’accord…. Sous surveillance du PS .

On s’est fait aider par un cabinet indépendant pour que les acteurs aient confiance, et qu’ils conçoivent les temps de co-construction, penser les comptes rendus et restitution. Il s’agissait de partager et de soumettre des propositions au débat : le but était que la ville se prépare à des engagements sur la durée du mandat.

Les  cabinets « La terre est ronde » https://www.terre-ronde.com/et « utile et agréable » (Eric Fourreau) ont été sollicités. Grande messe initiale avec la maire, qui devait soutenir le projet pour que ça marche. Il fallait qu’il y aie les professionnels et un maximum d’habitants : les gens s’inscrivaient sur internet, on est allés chercher les professionnels du social, de la santé, des gens dont on savait qu’ils étaient acteurs culturels mais qui ne se vivaient pas comme tels. (par exemple les Hôpitaux Psy qui travaillent avec l’arthérapie, etc..).

Grande tradition associative à Rennes. Heureusement que les acteurs sociaux font le travail pour la cité. Grande diversité de participants : c’est une condition du succès : sinon les acteurs culturels ne parlent que de leurs conditions d’exercice. Même s’ils sont tous proches des droits culturels, de gauche etc…ça n’est pas si évident de se parler les uns et les autres

On a fait différents ateliers comme « Atelier Culture et habitants », « Culture et territoire », « culture et développement social », « culture et enseignement » etc…un aspect très général pour que tout le monde s’y retrouve, et surtout pas par thème « professionnels » comme « danse » ou « théâtre » ou « langue bretonne ». Pour que les questions soient transversales  et que tout le monde parle avec tout le monde.

On a fait des « cafés culturels », organisés par des gens indépendants qui ont organisés ces cafés, dans toute la ville sans être sous contrôle : une seule obligation : en faire un compte rendu et faire remonter les contributions

Puis les cabinets ont fait une synthèse qui a été remis à la ville de Rennes et à l’adjoint. Et  la ville  devait ensuite dire quels étaient les moyens mis en œuvre pour faire marcher tout ça.

Quelques exemples :

  • Un des diagnostics a été qu’il se passe qq chose le dimanche. Faire qq chose tous les dimanches, gratuit, dans les espaces publics, une nouvelle proposition. On l’a fait. Des propositions artistiques, des ateliers ouverts, des spectacles de rue. Depuis beaucoup de gens dans la rue le dimanche. A Rennes, le dimanche est animé, parce qu’il se passe plein de choses. Et du coup on peut construire de nouvelels offres le dimanche (ouverture des bibliothèques ?).
  • Faire de la verdure dans la ville sur la base de travail en commun. Beaucoup de coopération entre les acteurs là-dessus.
  • Des provisions budgétaires pour « les rennais prennent l’art » (un projet à 2 /3000€ développé par des personnes ou des collectifs) pour faire des projets culturels dans le cadre d’une participation citoyenne,
  • Un jumelage entre une équipe artistique avec un quartier : la structure doit pendant trois ans rencontrer les acteurs sociaux avec un quartier « politique de la ville », proposer ses spectacles, inventer des ateliers, etc…
  • Programmation qui accueillent du jeune public
  • Symposium pour accueillir des artistes d’Europe pendant l’été en résidence
  • Soutiens aux acteurs des lieux intermédiaires pour mieux accompagner les artistes
  • 1% goudron (tous les travaux de voirie génèrent un budget culturel à 1%)
  • Enquête sur la participation auprès des établissements culturels. Comment on rend compte de l’efficience d’une action publique. Comment analyser les changements, l’impact auprès des personnes
  • La présence auprès de la jeune création, 215000 habitants 65 000 étudiants, bcp d’artiste autodidactes, et bcp de jeunes qui cherchent des expériences, d’où création de projets : « l’hôtel de création » de projets Toujours favoriser l’expérience artistique.
  • Des universités d’été artistiques, il se passait peu de chose l’été à Rennes, ville peu touristique, et le foisonnement culturel a permis de développer du passage dans la ville : un temps ou on accueillerait des artistes européens pour qu’ils se rencontrent à Rennes.
  • On a renforcé l’aide aux petits théâtres, aux MJC, qui s’intéressent plus aux jeunes créateurs
  • On a bcp débattu de l’occupation des salles municipales, salle de la cité, temple du rock, qui posait des problèmes de nuisance sonore :
  • Question de l’entrepreneuriat culturel : faciliter les rencontres entre les entreprises créatives qu’elles fassent du lien, ouverture au monde et diversité.
  • Et ce qui était peut-être essentiel : on a crée un un conseil des bienveilleurs de la vie culturelle avec trois collèges : 15 membres et 3 collèges (habitant.es, pros et pros autres secteurs) pour suivre les engagements pris par la ville. Par tirage au sort. Rapidement le conseil a voulu faire travailler un thème sur la participation dans les habitants : on a réuni tous les équipements pour entendre l’enquête des bienveilleurs : Comment on rend compte de l’efficience d’une action publique. Par exemple :qu’est ce que l’action du TNB a changé dans la vie des habitants ? Comment on fait pour évaluer l’effet : émancipation, ouverture au monde, lien social, éducation ? On demande juste que la question de pose. En fait on s’en fout des chiffres de fréquentation, ça ne répond pas à des objectifs de politique publique. Comment défendre le budget d’un Opéra sans pouvoir dire cet impact sur la vie des citoyens ?

 

Il faut prendre le risque que les gens disent des bêtises , même si les services se sentent agressés. La ville n’a pas à réagir tout de suite elle doit réagir à la fin. Ca déstabilise bcp les équipes.

On a bcp travaillé avec les services pour qu’ils ne prennent pas les choses mal.

Faire les choses sur place. On a même fait des interviews dans les jardins publics..

Le redéploiement c’est très difficile : En tout on a redéployé 10K€ sur six établissements, donc on a du prendre un peu ailleurs…

Il faut aussi rendre accessible toutes les données ce qui est très compliqué pour les artistes : le responsable des arts plastiques, il préfère donner des moyens ou des résidences aux gens qui sortent d e l’école d’art, par exemple. Or, moi je voulais absolument qu’ils ouvrent au street art, ou au rap…Pour cela on a regardé qui était aidé ou pas aidé dans les artistes. On a pas cessé de donner aux uns, mais on a donné aux autres. Très important de croiser des données car il faut que citoyens puissent être documentés pour qu’ols participent aux débats.

Et pour la campagne 2020 et le mandat 2020/2026 ?

Ce qui change à partir de 2020, c’est comment on va participer à un territoire plus résilient. C’est ça mon enjeu pour 2020/26. Les acteurs sont favorables à ça. On a un climat de confiance et c’est un territoire plus facile là-dessus. On a avancé, on a des canaux de dialogue, on a construit quelque chose qui peut être utilisé maintenant à d’autres fins. Il va falloir repenser les missions des institutions.

On pourrait avoir un spectacle lyrique, en moins et puis utiliser cet argent là on le réaffecte à d’autres choses, pour une nouvelle pratique artistique, mais avec les mêmes acteurs

Il faut partager avec les responsables. Je peux convaincre à accueillir plus, à être plus ouvert.

Va-t-on faire des états généraux N°2 ? Quels sont les nouveaux enjeux et relais ?

Les grandes instituions 70% du budget les autres 30% , on doit faire bouger ce ratio

La DAC s’est mise en ordre de marche, chaque engagement a été validé par la DAC, (ce qui a été fait et l’évaluation, et où on en est) et ouvrir de nouveaux chantiers. Je ne pense pas faire un 2ème états généraux, mais plutôt de faire qq chose au niveau métropole. Par contre je vais continuer la démarche notamment, l’assemblée de la culture. Les états généraux doivent être un moment de changement, là on va être dans une continuité

Les bâtiments vacants et les terrains:

Tant que le maire ne sera pas écolo, les bâtiments ne sont pas accessibles…c’est l’urbanisme qui décide, pas la culture. Prêt à aborder les questions de démocratie décisionnelle. Les bâtiments vacants : une agence intercalaire. Y compris les terrains nus. Consulter l’Assemblée des acteurs.

Budget :

La Ville a maintenu son budget. 0% d’augmentation pour les institutions. On a pris un peu ailleurs et donc on a un peu plus investi dans la culture .Dimanches à Rennes c’est du budget rajouté.

 

 

Michel Balbot, ancien maire de Mellionec (470 habitants, Côtes d’Armor)  et président de Communauté de Communes d’une zone rurale.

310 habitants au départ (aujourd’hui 470), dans une communalité de 23 communes

Formation : Sociologie des sciences de l’éducation, une carrière professionnelle dans l’éducation populaire

 Mellionec une commune rurale historique communiste, mais le communisme centralisateur. Notre force c’était que le communisme pensait que la commune disparaîtrait. On avait un filtre à l’époque : faire une ville durable, etc. Notre sujet, quand on a pris la ville, c’était la démographie et la culture. L’agriculture, on avait aucun pouvoir dessus, et l’économie tout le monde se battait dessus.

 

Impossible de se faire remarquer. C’est pourquoi notre commune qui était en plein marasme cherchait le moyen de sortir de là. On a fermé des décharges, nous avons décidé de protéger ce qui restait du patrimoine de la commune, on a crée une école, seule école ouverte en 70 ans dans les Côtes d’Armor. Il fallait avoir des services aux personnes, et l’école c’était le plus intéressant.

 

Sur la culture nous nous sommes appuyés sur ce qui existait sur la commune, on a crée une association qui était une association de services aux associations existantes. Cette association proposait des spectacles, etc.…et cela permettait de professionnaliser et de donner des structures pour payer les salaires, etc.

On a donc crée un évènement, une biennale d’art contemporain, ou les artistes amenait des œuvres que l’on posait aussi bien dans des lieux publics que des lieux privés.. avec des échanges avec les citoyens qui devaient accueillir les œuvres dans leurs propres jardins et accueillir les visiteurs. D’accord ou moins d’accord, avec telle œuvre, ça les obligeait à choisir, à se positionner sur l’art contemporain.

On a défendu à fond le 1% culturel qui à l’occasion d’un changement de compétences de l’état aux régions n’a pas été transféré. Le 1% devait entrer dans un projet culturel écolo. Dans notre communauté de communes il y a toujours le 1% culturel. La région bretagne dont le président s’était engagé à défendre ce 1%, a donc, à l’issue d’une bagarre homérique,  repris ce 1% culturel à son compteMais les services de la région ont voulu décider eux-mêmes quelles œuvres devraient bénéficier du 1% culturel . Nous nous tenions à ce que ce 1% soit absolument à la main des collectivités qui payent

On a crée aussi les  « villages culturels d’europe », un réseau de 11 villages en Europe, qui se sont basés sur la résistance : résistance par exemple à la construction d’un aéroport, le NDDL irlandais. On allait les uns chez les autres et on échangeait sur l’artisanat. La moitié des jeunes de Mellionec ont été dans ces villages, et des réseaux d’anciens se racontant les vieilles histoires : Des estoniens qui vous racontent sous Staline ou des espagnols qui racontent des choses sur Franco, ça a fait des soirées passionnantes et émouvantes. Du coup ça fait de nos habitants des gens qui échangent qui évoluent.

 

On aussi développé une école de musique associative dans la communauté de communes, pour 22000 habitants on a 600 élèves ce qui est important, on a résisté au fait d’intégrer les associatifs comme fonctionnaires territoriaux, sans devenir un organe communal. On a donc pu organiser des festivals. On a réussi à avoir un gros parc d’instruments, avec lequel les élèves  peuvent s’initier.

En 2007 s’est crée Ty film, festival sur le documentaire, c’est le bras armé de la politique documentaire . 10000 visiteurs dans ce village de 400 habitants, on fait parler les artistes avec les enfants.

10 spectacles vivants par an sur la Commune.

On a pas « amené la culture », on a amené des outils qu’on a mis à la disposition des associations. C’est aussi parce que j’ai discuté avec les chasseurs, qu’on a échangé, qu’ils ont accepté de venir dans nos évènements. J’ai utilisé le discours de Marie Blandin aux monuments aux morts de Mellionec, ça a fait du débat, du lien. C’est ça qui attire les gens, qu’ils soient d’accord ou pas.

Autre réflexion : la culture gratuite, nous sommes confrontés à la culture gratuite des villes : nombre de spectacles gratuits pour le tourisme, la comm et le tourisme empêchent les gens d’investir dans la culture sur leurs territoires …Pourquoi les villes n’impliquent pas le territoire rural derrière. Souvent ces territoires logent, parfois se tape les nuisances (rave party), il faudrait qu’il y aie du travail, la ville nous demande des prestations gratuites (chemins de randonnées) et le partage entre ville et villages reste embryonnaire.