Evolution du Ministère de la culture
Partager

1/ Etat des lieux/exercice de gestion prévisionnelle pour la période 2011-2013

 

En 2010, l’analyse des caractéristiques et des évolutions de la population des agents du MCC confirme les grandes caractéristiques soulignées lors de la réunion du 28 mai 2011.

1/ Vieillissement de la population : âge moyen des agents du ministère : 48,2 ans en 2010.

2/ La catégorie A, dont le renouvellement n’a pas été assuré ces dernières années, compte une forte proportion d’enseignants (plus du quart) dont le départ prochain nécessitera/ait des recrutements.

3/Difficultés à résoudre les problèmes de redéploiement du fait de l’émiettement des effectifs sur le territoire.

4/Les besoins de redéploiement en dehors du périmètre ministériel sont marginaux dans la mesure où aucune mission n’est abandonnée et qu’il n’y a donc pas, en dehors de l’application de la règle de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, de mesure de redéploiement collectif à gérer. Ces besoins se limitent à l’accompagnement de la mobilité de personnes dont les services sont appelés, à l’occasion des réformes, à déménager ou être transférés.

 

La gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences se heurte à l’éclatement budgétaire des périmètres d’emplois, à la diversité des statuts juridiques des personnels, à l’hétérogénéité des structures d’emplois et des métiers des agents.

 En 2010, l’emploi du ministère de la culture (ministère et opérateurs sous tutelle) représente  30 815 ETP budgétés.

Ce chiffre recouvre l’emploi culturel au sens large qui se répartit sur plusieurs périmètres budgétaires :

1/ Les emplois supportés par le budget du ministère de la culture : 11 496 ETPT, dont :

  • 6 990 emplois répartis dans les services de l’administration centrale, les services déconcentrés (DRAc et STAP), les services à compétence nationale.
  • 4506 emplois (affectés dans les EPA).

 

2/ Les emplois des établissements publics administratifs financés sur leurs budgets propres :

  • 12 661 ETPT (auxquels s’ajoutent 4 506 emplois financés sur le budget  du ministère de la culture.)

 

3/ Les emplois des établissements publics et commerciaux financés sur leurs budgets propres :

  • 5 918 ETPT.

 

4/ Les emplois financés par les associations sous contrôle, financés sur leurs budgets propres :

  • 740.

 

Depuis 2003, deux faits ont marqué l’évolution des emplois du ministère de la culture :

1/ La mise en place de la Lolf, en 2006, a modifié la structure des emplois du ministère en élargissant le plafond d’emplois aux agents payés sur crédits ainsi qu’aux emplois des associations.

2/ Le ministère de la culture a renforcé les effectifs des établissements publics qui portent les principes politiques publiques du ministère en transférant sur certaines de ces structures la responsabilité de la gestion de leurs emplois (Louvre, BNF, Cité de l’architecture et du patrimoine, musée du Quai Branly, Cité nationale de l’histoire de l’immigration, établissement public de Chambord, Galeries nationales du grand palais.)

Aujourd’hui, les opérateurs :

  • portent budgétairement 63% des emplois
  • représentent, compte tenu des emplois affectés, 77% de l’emploi global du ministère
  • ont la maîtrise budgétaire de 81% de leurs emplois.

 

Dans le même temps, les emplois « inscrits » sur le budget du ministère ont diminué de près de 18%, passant de 13 966 à 11 496.

 

 

2/ Une structure RH dispersée, des métiers peu substituables

Avec une force de travail qui ne représente que les effectifs d’une académie moyenne de l’Education nationale, le ministère doit faire vivre un réseau déconcentré et un grand nombre d’opérateurs et de services à compétence nationale. Il participe également à plusieurs réseaux décentralisés telles les archives départementales et les bibliothèques municipales classées.

En terme de structure d’emplois, le ministère présente une situation contrastée :

Les 11 principaux opérateurs du ministère regroupent 50% de l’emploi : Versailles, Orsay, Louvre, CNACGP , RMN , BNF , INRAP, CMN, Comédie française, Opéra de Paris, Cité des sciences et de l’industrie. Ces grands opérateurs se caractérisent par :

  • une forte concentration en région Ile-de-France
  • une envergure nationale, voire mondiale
  • des ressources propres ayant permis une forte dynamique des emplois.

 

En « grands blocs » les typologies des métiers/fonctions/missions du Ministère se déclinent  comme suite :

1/ Définition, gestion et pilotage des politiques culturelles en administration centrale :

  • Peu de contact avec le public
  • Dimension nationale
  • Elaboration de la politique culturelle et pilotage de sa mise en œuvre (tutelle des établissements etc.)
  • 6% des emplois du MCC.

 

2/ Réseaux et publics :

  • Contact important avec le grand public
  • Dimension locale, nationale voire mondiale
  • Mise en œuvre opérationnelle des politiques culturelles
  • Liens avec les collectivités territoriales
  • 61% des emplois du MCC.

 

3/ Enseignement :

  • Contact important avec le grand public
  • Dimension locale, nationale voire mondiale
  • Mise en œuvre opérationnelle des politiques culturelles
  • Liens avec les collectivités territoriales
  • 15% des emplois du ministère.

 

4/ Protection du patrimoine :

  • Contact avec un public spécialisé
  • Dimension plutôt locale
  • Liens avec les collectivités territoriales
  • Mise en valeur du patrimoine culturel au niveau des STAP
  • 10% des emplois du MCC.

 

5/ Production, édition et création :

  • Contact avec le grand public
  • Dimension nationale
  • Création et inscription dans une tradition culturelle (édition, mobilier, tapisseries, céramique etc.)
  • Liens avec les collectivités territoriales selon les cas de figure
  • 2% des emplois du MCC

 

6/ Action territoriale :

  • Contacts avec les collectivités locales
  • Dimensions régionales
  • Déclinaison au niveau local de la politique culturelle nationale
  • 6% des emplois du MCC.

 

Par ailleurs, les effectifs du ministère sont dispersés sur un grand nombre de métiers : conservateur, architecte, archéologue, enseignant, archiviste, bibliothécaire, chercheur, artistes, lissier, doreur, jardinier d’art, agent d’accueil et de surveillance, agent des services techniques, ingénieurs, etc.

La multitude de ces métiers peu substituables et répartis sur tout le territoire rend particulièrement difficiles les redéploiements d’effectifs. Les reformes touchant à la mobilité professionnelle ou géographique nécessitent des mesures d’accompagnement sur le plan des effectifs.

En raison de l’évolution de la structure de l’emploi au ministère, le suivi en gestion a été reformaté en trois filières : administrative (incluant la majorité des contrats), technique (correspondant aux métiers d’accueil, de surveillance et de magasinage, ainsi qu’aux ingénieurs et techniciens des services culturels) et scientifique (intégrant notamment les métiers de l’enseignement).

Les contractuels représentent 12% des agents du ministère (sous plafond d’emplois). Ils sont présents dans la filière administrative et parmi les enseignants où ils représentent  environ un tiers de l’effectif.

 

3/ Eléments démographiques :

L’âge moyen des agents du ministère est de 48,2 ans en février 2010.

Si le ministère vieillit rapidement et si la moyenne d’âge de ses agents est élevée, c’est largement le fait de la faiblesse des primo-recrutements de ces dernières années. Les titularisations Sapin des années 2000 et les accueils en détachement pour combler la vacance au fil de l’eau ont souvent concerné des agents de plus de 40 ans et n’ont pas permis le renouvellement des effectifs : il convient de souligner que seulement 2,8% des agents ont moins de 30 ans.

L’essentiel des effectifs (70%) est composé des agents qui ont entre 40 et 59 ans. Ces effectifs ne sont, pour la plupart, pas directement concernés par un départ en retraite et ne peuvent que difficilement envisager de mobilité professionnelle sans une incitation forte.

Ces données très différenciées en fonction des catégories traduisent bien les grandes vagues de recrutement du ministère dans les années 80 ainsi que l’absence de recrutement et les réductions d’emplois des dernières années qui ont empêché le ministère de reconstituer les effectifs.

Elles montrent également le déséquilibre démographique de la catégorie A dont 17% des agents ont plus de 60 ans.

En 2009, 268 agents sont partis à la retraite (titulaires et contractuels). 44% de ces départs ont concerné la catégorie A  alors qu’elle représente 37% des effectifs.

 

L’émiettement des effectifs sur le territoire, notamment en raison de la structure du ministère et de ses missions à l’égard du public, rendent les possibilités de redéploiement extrêmement faibles.

Dans le même temps, la part de chaque catégorie dans les effectifs ne répond pas aux besoins et nécessite un rééquilibrage.

La catégorie B, qui ne représente que 20% des emplois de titulaires, est insuffisante, et la catégorie A, dont le renouvellement n’a pas été assuré ces dernières années, compte une forte proportion d’enseignants (plus du quart de la catégorie A) dont le départ prochain nécessitera/ait des recrutements.

La réforme des retraites a eu pour effet de retarder les départs notamment dans la catégorie A.

Toutes catégories confondues, le nombre de départs en retraite a été de 268 en 2009, parmi lesquels la catégorie A  représentait la plus large proportion (48% des départs d’agents titulaires). Le pic des départs à la retraite du ministère de la culture devrait avoir lieu en 2012-2013. Le pic de départs des catégories A se situe avant celui des catégories B et C.

A partir de 2012, la proportion des catégories B et C dans les départs devrait augmenter.

 

Par  conséquent, la perspective d’un recentrage des effectifs sur les catégories A en ne jouant que sur les départs non renouvelés de la catégorie C ne pourra pas être atteinte avant 2016. En effet, les comportements de départs à la retraite plus tardifs en catégorie A qu’en catégorie C ne parviennent pas à compenser l’importance des classes d’âges de plus de 53 ans chez les cadres.

Pour le ministère de la culture, la seule manière d’atteindre cet objectif dans les 6 ans à venir reste donc de favoriser les recrutements en catégorie A. Cela devrait être d’autant plus bénéfique pour le ministère que l’importance, à court terme, des départs des catégories A pourrait renouveler( à coût pondéré) cette catégorie avec des cadres en début de carrière !

 De plus, les départs importants d’agents de catégories A concernent principalement ceux qui sont le plus impliqués dans le cœur de l’activité du ministère, notamment les personnels de conservation, les personnels enseignants (écoles d’architecture), les inspecteurs/conseillers. L’absence de recrutements sur ces domaines mettra en situation difficile le ministère qui se retrouvera/ait dans l’impossibilité d’assurer les missions fondamentales qui sont les siennes.

 

4/ Axes d’évolutions

Ce constat exhaustif portant sur le Ministère de la culture permet de poser les bases de la réflexion qui peut être celle d’EELV dans le cadre d’un programme gouvernemental pour 2012.

Il est important de conserver l’idée d’un service public fort au bénéfice de la culture.

Ce service public doit évoluer. Il doit évoluer vis à vis des collectivités territoriales et il doit aussi produire une mue vis à vis de l’ Europe.

Si nous souhaitons garantir la place de la culture comme une force active, alors, il est indispensable de réfléchir à la réforme institutionnelle de ce ministère régalien, très technique mais où il y a encombrement avec un Cabinet trop important, des administrations de centrales trop présentes et peu réactives et des services déconcentrés qui auraient besoin d’être renforcés.

 

Ces services devraient vraiment être les partenaires des Régions au sens où on entend aussi la réforme des régions ; sic le passage de 22  régions à 12 ou 10 ( même si on aurait pu  espérer mieux: 8 ). Ceci à prendre dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme des régions à 10 ans.

Les nombreuses compétences réunies au sein du ministère peuvent plus et mieux servir le bien commun d’une grande région : l’archéologie  pour le patrimoine  serait à mettre en commun par exemple.

 A l’œuvre, les services de l’Inventaire qui ont été transférés aux régions est une juste et bonne décision.

Plus encore, il serait important de mettre les compétences des services déconcentrés pleinement au service des collectivités. Ce n’est pas le cas  aujourd’hui  puisqu’on « joue » les analyses des uns et celles des autres avec des RDV permettant des échanges croisés parfois fructueux mais parfois bien compliqués.
Demain, il s’agirait de réorganiser la vie, les  missions des services déconcentrés et cela par grandes régions.

 Ainsi, les scientifiques, techniciens, experts travailleraient au développement d’un territoire singulier, étendu, à la fois multiple  et cohérent mais qui n’aurait pas à définir  sa politique culturelle depuis Paris et les administrations centrales.

 

Au travers de cette intention, il n’est pas perdu de vue que des missions régaliennes doivent s’imposer partout de la même manière. On peut notamment penser aux enseignements artistiques et organisation des diplômes. Il serait , bien entendu, invraisemblable et dangereux de mettre en œuvre tel type d’enseignements et tel diplôme à l’Est et tel autre dans le Sud.

Des aspects législatifs doivent rester « uns » : protections des personnes, législation sur la danse, etc.

De la même manière, le Ministère a peu produit de textes réglementaires pour tout ce qui touche la création ( au sens large).

Cette souplesse permettrait avec les collectivités de réfléchir et de trouver des termes communs de langage et de politique par grandes régions.

 

Sans doute que  travailler dans une proximité plus aboutie avec les collectivités permettrait aussi de penser sur le long terme et de penser plus et mieux aux hypothèses de projets inter-régionaux.

En effet, les régions n’ont pas du tout ou beaucoup trop peu développé  les projets culturels inter-régionaux depuis 20 ans.

Au mieux, le travail s’est tissé, noué avec les départements et grandes villes ou agglomérations mais que de difficultés ! Aucune en cette fin 2011 ne peut revendiquer un projet structurant avec une autre région.

La réorganisation du Ministère permettrait de penser cela comme les cantons suisses ou landers allemands le font depuis longtemps.  La mise en œuvre de politiques culturelles par régions pourraient tout à fait se mettre en œuvre et se définir selon des priorités et des marquages  singuliers ce qui offrirait plus de visibilité à ce qui serait le projet culture du grand ouest par rapport à la région centre, par exemple.

En tout cas, il est vain de penser que le Ministère de la culture peut rester tel qu’il est alors que demain se met en place la réforme des régions et celle des collectivités aussi.

 

Il est tout aussi vain de penser que les régions dans leur format actuel puissent se contenter de « faire » de la culture comme elles le pratique depuis 20 ans car vu de l’étranger ou d’une autre région  celle qu’on examine ; on a toujours l’impression que c’est pareil partout! Partout, des festivals, des grandes manifestations, des biennales, des Scènes nationales, conventionnées ( avec partout les mêmes critères, indicateurs, etc)… L’aspect propre au caractères des régions ne s’en trouve pas renforcer ou relever : » on fait de la culture et on a tous une  grande manifestation» pourrait-on résumer.

Si on veut aussi que le citoyen soit véritablement partenaire, attentif au projet régional, alors, il faut organiser les choses autrement. Placer la pensée culturelle depuis la capitale n’est plus possible et la  placer depuis les seuls hôtels de régions est réducteur.

 

Par rapport à L’Europe, EELV a une parole politique qui insiste sur l’importance et l’intérêt à croiser avec ce partenaire multiple et composite.

Là encore, dans le projet politique, rappeler le souci de mixité, d’échanges, de rapprochement à l’autre est une priorité. On  peut donc  souhaiter un maillage renforcé des politiques culturelles avec des grandes régions, un ministère réorganisé territorialement avec l’Europe pour définir des cadres, des missions, et accompagner les projets.

Les étudiants, les artistes nous y conduisent ; il faut donc le mettre en œuvre.
Trop longtemps on est allé chercher à Bruxelles ou Strasbourg des subsides financiers importants pour de purs projets politiques/ciens. Ce n’est pas bien et d’ailleurs le citoyen et électeur ne s’y est pas totalement trompé quand il s’est agi de lui demander son avis sur tel « grand projet » dans sa région.

Dans le cas présent, il s’agirait de placer le citoyen au centre de cette entité européenne et de se poser la question du partage culturel. Quels projets attendons-nous ? Que voudrions-nous voir mis au pot commun ? Quelles craintes avons-nous vis à vis d’une culture supra nationale quand déjà l’Amérique a presque tout couvert ? Quel risque à dégager des lignes de forces culturelles qui concerneront/aient d’autres que nous et d’autres cultures et d’autres langues maternelles ? Toutes ces questions et bien d’ autres sont déjà posées par nos concitoyens. C’est donc à EELV de songer à rapprocher l’Europe des régions et non le contraire.

 

Les projets doivent venir des régions et être partagés avant de vouloir les imposer ou les faire grandir trop vite.

Demain, il faudra que l’équilibre des politiques culturelles se définisse et se construise en adéquation avec les priorités des grandes régions. Le ministère ne pourra plus se concentrer au travers d’une politique d’abord nationale, qu’on pourrait aussi qualifier de d’abord économiste ou à court terme depuis 2007.

Le partenariat vertueux doit être rappelé comme une priorité. Ce n’est qu’ainsi que les projets pourront être partagés par le plus grand nombre. Les citoyens aujourd’hui n’adhèrent pas, voire pas du tout au projet d’ Europe : cela ne représente rien pour eux ou effraye.

En région, les politiques nationales sont très souvent vécues comme agressives et ne prenant pas en compte la réalité d’un terrain, ses spécificités.

Il faut donc remettre à plat ce schéma de gouvernance.

 

Pour cela, il faut rencontrer les acteurs locaux, les syndicats, les professionnels de la culture et les amateurs qui sont ou peuvent être des consommateurs au sens positif de ce mot.

Ce travail là, ne peut pas être l’affaire de membres de la commission de la commission culture d’EELV mais doit être repris par ses élus.

 

 

Le 22 juin 2011

Isabelle Vierget-Rias

Membre du Bureau de la commission culture EELV